Ligne à grande Vitesse Paris-Orléans-Clermont-Lyon
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Intervention au Conseil Régional // Olivier Longeon // 16 Décembre 2011

Le débat public sur la Ligne à Grand Vitesse Paris-Orléans-Clermont-Ferrand-Lyon est ouvert.

Quel drôle de débat. En effet, comme il est fort bien écrit dans la délibération : « Le projet de LGV entre Paris, Orléans, Clermont-Ferrand et Lyon (POCL) est inscrit, dans la Loi de programmation du Grenelle de l’environnement, au titre de la 2ème phase des projets de LGV à mettre en œuvre. »

Drôle de débat public donc sur l’utilité d’un projet que le gouvernement a choisi de graver dans le marbre en légiférant pour imposer la nécessité de la réalisation de cette ligne avant même de consulter la population.
Nous serions au niveau de la célèbre phrase de Philippe Essig, lorsqu’il était président de la SNCF: « L’enquête publique est aux grands travaux ce que le compte à rebours est au lancement de la fusée Ariane ».
Elle montrait bien le peu de volonté de cette entreprise nationale de débattre.
Tous les jours nous constatons d’ailleurs que cette grande entreprise nationale a une faible volonté d’écouter ses usagers. Les récentes grilles horaires 2011 et 2012 imposées sans consultations, n’en sont qu’un autre exemple.

Mais revenons à la LGV POCL. A la naissance du réseau TGV, la question préalable était celle de la rentabilité de l’investissement avant toute décision de construction de Ligne à Grande Vitesse.
Aujourd’hui, les beaux engagements du gouvernement UMP sur le désendettement sont piétinés par ce débat sur la Ligne à Grande Vitesse. Le gouvernement de l’UMP décide que la règle d’or ne s’applique pas. Point de soucis de choisir de réaliser une infrastructure selon ses capacités de rentabilité et de respect des 3%. L’État décide d’une infrastructure parce qu’il lui faut des grands travaux pour faire tourner l’économie, à charge pour les collectivités que l’État prive de subsides, à charge pour les collectivités et la SNCF de boucher le trou futur d’une exploitation déficitaire …

Conscient de cet écueil, vous avez cosigné, monsieur le Président, la déclaration des présidents de région. Je vous cite donc. « Aussi, les cinq Régions expriment conjointement et unanimement, en raison des conditions dans lesquelles sont définies leurs ressources financières et au regard des charges qui pèsent sur elles par ailleurs, leur incapacité et donc leur refus de prendre un engagement à participer au financement de la ligne LGV POCL.»

Ce que nous approuvons, et comme pour l’A45, cela signifie que le projet à déjà de fortes chances de ne pas se réaliser. Ce qui intéresse d’autant plus Europe Ecologie Les Verts puisque dans la même déclaration vous souhaitez financer l’amélioration des lignes TER.

En France, tous modes de transport confondus, les trajets de moins de 50 km représentent 98% du total des déplacements. Or, les usagers expriment avec force leur insatisfaction face aux défaillances du service ferroviaire existant, en qualité comme en quantité. Malgré les efforts des Régions sur le niveau de desserte, le matériel roulant et l’aménagement des gares, l’offre souffre de deux carences majeures :
– l’inadaptation d’une grande partie des infrastructures (voies, signalisation…), certaines étant saturées, d’autres fortement dégradées ;
– la détérioration des conditions d’exploitation et de la réactivité face aux aléas (maintenance, personnels de réserve…).

Les attentes des usagers sont simples et légitimes : avoir près de chez eux une gare bien desservie par des trains qui arrivent à l’heure pour aller travailler. En période de grande disette budgétaire, au seuil d’une transition énergétique dont on voit se dessiner les contours, la France ne doit pas se tromper de priorité ferroviaire.

Comme la délibération le rappelle «  L’Etat a fixé quatre objectifs au projet  dont celui de constituer un itinéraire alternatif pertinent à l’actuelle LGV Paris – Lyon, qui doit faire face à une forte croissance des trafics ferroviaires entre le Nord et le Sud. »
Et c’est bien là que réside toute la problématique de l’exercice.
L’État veut une ligne alternative au Paris Lyon actuel. En décidant de mieux desservir au passage le Massif central, il décide de placer l’axe à l’Ouest de l’existant. Mais il ne va pas plus loin dans la définition.
La SNCF annonce d’entrée que la seule solution rentable et qu’elle choisi, c’est l’axe médian. Pour le public, l’axe médian cela ne veut rien dire. Pour les personnes averties par la chose ferroviaire cela veut dire qu’on passe au plus court, assez loin des agglomérations soit-disant desservies.
L’axe médian, pour moi, c’est aussi l’axe de la Loire, l’axe de ce dernier grand fleuve sauvage d’Europe dont on amputerait au passage certains paysages, certaines zones humides, des espaces naturels et agricoles pour que quelques lyonnais aillent plus vite de Paris à Lyon.

Conscients de ce problème de tracé, comme le dit la délibération « Les acteurs locaux concernés par le projet ont fait émerger des objectifs complémentaires afin d’accroître la pertinence du projet:
– améliorer les liaisons ferroviaires entre Rhône-Alpes et l’Auvergne;
– améliorer les relations transversales entre la façade atlantique, Rhône-Alpes et au-delà;
– assurer un lien ferroviaire entre les plateformes aéroportuaires;-articuler la LGV en cohérence avec les réseaux existants de transport en commun. »

Nous sommes prêts à dire « banco » car nous partageons une très grande part de ces choix stratégiques. Nous avons quand même un sérieux bémol car un TGV ne crée pas de liens viables économiquement entre 2 plateformes aéroportuaires, il accélère leur fermeture ce qui est bon pour le protocole de Kyoto sauf quand les collectivités veulent absolument les maintenir à coup de millions d’Euros de subventions comme à Andrézieux Bouthéon ou St Etienne de St Geoirs (ou le CG 38 en vient maintenant à se poser la question du maintien de ses soutiens à l’économie hautement carbonée du low cost des neiges…).

Nous sommes prêts à dire « banco » et dire avec vous, comme nous l’écrivons dans notre cahier d’acteurs que nous voulons un projet qui répondent
aux vrais besoins :
– des trains qui maillent finement le territoire et un service fiable ;
– les impératifs énergétiques et climatiques ;
– les enjeux de préservation des espaces naturels ;
– une vision équilibrée de l’aménagement du territoire ;
– les réalités budgétaires.
Mais dans ce cas, ce scénario n’est pas celui de la très grande vitesse mais celui d’une volonté de développement très important du réseau TER et inter-régional.

Pour POCL, un scénario alternatif existe. Il s’appuie sur une optimisation de l’ensemble du réseau TER existant, à partir de deux axes nettement plus structurants pour les liaisons interrégionales : Paris – Orléans – Limoges – Toulouse et Nantes – Tours – Bourges – Lyon.

Nous demandons donc qu’il fasse l’objet d’une étude financière et technique le mettant en balance avec les scénarios LGV : coût, niveau de desserte obtenu, populations dans un rayon de 50 km autour des gares desservies, gains de temps et accessibilité globale du territoire à partir de chacune des villes. Les citoyens des territoires concernés ont droit à l’ensemble des paramètres leur permettant de se forger une opinion éclairée.

Nous partageons donc le constat et l’analyse des besoins, mais de la démonstration nous ne tirons pas la même conclusion. Nous votons donc contre ce cahier d’acteurs qui donne la part trop belle au mythe de la grande vitesse et nous déposerons notre propre cahier d’acteurs en guise de contribution au débat.