Rapport Développement Durable 2021 Intervention de Julie Tokhi au Conseil de Saint-Etienne Métropole // 27 janvier 2022
Partager

Durable, vous avez dit durable ???

En préambule de ce rapport Développement Durable, Mme Fayolle avance que, je cite, “Saint-Etienne Métropole a continué de jouer son rôle de chef de file dans le domaine de la transition écologique et solidaire.” Oui, des actions sont menées, mais pour se targuer d’être des chefs de file, il aurait fallu que ces actions soient mises en place il y a plus de 20 ans… 

Dans ce document, on égraine les labels. Mais quand on gratte légèrement, on se rend compte que l’exécutif fait le strict minimum pour sauver les apparences. Le label Climat-Air-Energie par exemple : Saint-Etienne Métropole n’en est qu’à la 1ère étape du processus, c’est-à-dire l’état des lieux. Pourtant, ce processus qui dure 4 ans est engagé depuis 2 ans déjà. A mi-parcours, où en sommes-nous ? 61 mesures sont avancées, mais lesquelles ? A quoi ça correspond, par rapport aux 500 points proposés par l’ADEME ? En gros, on comptabilise ce qui est fait, donc ça parait beaucoup, mais on ne contextualise pas le chemin à parcourir. De même, monsieur le Président, vous nous aviez annoncé un point d’étape à mi-parcours du PCAET, le Plan Climat-Air-Energie Territorial. Là aussi, nous sommes à mi-parcours. Quand allez-vous nous le présenter ?

De la même façon, Saint-Etienne Métropole met en avant dans sa communication l’obtention du Label économie circulaire octroyé pour 4 ans. Mais attention : il ne s’agit que du 1er palier… C’est-à-dire que ce n’est qu’une reconnaissance de l’engagement du territoire, un niveau minimum d’engagement, un “échelon stimulant et accessible de progression”. Ce n’est pas moi qui dis cela, mais l’ADEME, l’organisme qui attribue ce label.

Pour en revenir au volet transition énergétique, le territoire de Saint-Etienne Métropole est doté de 9 réseaux de chaleur : certains sont gérés par un prestataire, en Délégation de Service Public, et d’autres en régie. Ce rapport nous apprend qu’une étude est en cours pour la mise en place d’équipements solaires thermiques sur des installations de réseaux de chaleur, ce qui est une bonne nouvelle. Mais ces installations solaires ne sont envisagées que sur les réseaux de chaleur gérés directement en régie publique. Pourquoi pas sur les installations en DSP ? Doit-on comprendre que la collectivité n’a pas la main sur les installations gérées par des prestataires ? 

Un peu plus loin, on apprend que le fonds de chaleur territorial va permettre d’éviter le rejet de 552 tonnes de CO2 sur l’ensemble du territoire TEPOS (Saint-Étienne Métropole, Communautés de Communes des Monts du Pilat et du Pilat Rhodanien). Très bien mais remettons en contexte : en France, un habitant consomme en moyenne 4,62 tonnes de CO2 par an. Si on rapporte ce chiffre ne serait-ce qu’à la population du territoire de Saint-Etienne Métropole, nous pouvons estimer que nous rejetons environ 1.848.000 tonnes par an rien qu’à Saint-Etienne Métropole. Donc 552 tonnes de moins, c’est bien, c’est toujours ça de gagné, mais cela représente seulement 0,0003% des émissions produites sur le seul territoire de Saint-Etienne Métropole. Vous conviendrez que c’est très insuffisant par rapport aux enjeux actuels.

Sur la rénovation énergétique, 78 particuliers ont converti leur système de chauffage au fioul par une énergie dite plus  propre. Là encore, une mise en contexte aurait été pertinente. La collectivité gagnerait en efficacité en définissant un objectif à partir du nombre de logements équipés au fioul.

Ce sont les services de Rénov’actions42 qui sont chargés d’accueillir et accompagner les propriétaires qui souhaitent effectuer des travaux dans leur logement pour gagner en efficacité énergétique. Leurs équipes mènent cette action avec sérieux et professionnalisme et je tiens à saluer la qualité des prestations proposées. La demande est telle que les équipes ont dû être renforcées et nous devons nous en réjouir. Avec l’aide de ce dispositif, ce sont 403 logements qui ont été réhabilités et 560 projets qui ont été accompagnés. Néanmoins, je regrette que l’accompagnement ne se fasse que sur sollicitation. Une nouvelle fois, on compte sur la bonne volonté des propriétaires. Existe-t-il une évaluation du nombre de passoires énergétiques sur le territoire ? Certaines agglomérations le font depuis plus d’une décennie, en effectuant des photos aériennes infra rouges afin de repérer les logements provoquant le plus de déperdition de chaleur. La réalisation d’une telle cartographie permettrait ensuite, comme c’est fait ailleurs, de définir des logements prioritaires, de solliciter directement leurs propriétaires et en fonction de leur situation, de leur proposer des solutions d’accompagnement adaptées. 

Pour ce qui est de la gestion des déchets, le rapport met en avant la mise en œuvre du Plan Local de Prévention des Déchets Ménagers et Assimilés, l’extension des consignes de tri, le compostage… Mais ces améliorations, rappelons-le, sont des obligations nationales, et l’exécutif attend le dernier moment pour agir. Donc faisons preuve d’humilité, pas de quoi s’estimer innovant ou précurseur ! 

Ensuite, dans le volet “cohésion sociale, solidarités, accessibilité et lutte contre les discriminations”, on retrouve le projet de Cité Design 2025 qui vient de nous être présenté. Comme quoi, il est possible de mettre tout projet en avant sous cette étiquette ! M. Chassaubéné a insisté sur sa dimension de développement territorial. Installer un centre social et culturel au sein de ce projet ne suffira pas à gommer sa logique mercantile.

Enfin, je cite à nouveau, “des aspects Développement Durable sont intégrés dans les marchés publics lorsque cela est possible”. Résultat, seulement 32 procédures sur 460 intègrent un critère Développement Durable pour juger de la pertinence des offres. Donc moins de 7% ! De même, 45 procédures seulement sur 460 intègrent une clause Développement Durable d’exécution du marché, soit moins de 10% ! Soyons sérieux, nous ne pouvons pas, nous ne devons pas nous en satisfaire. 

Le Développement Durable est une nécessité pour la planète comme pour notre territoire. Il ne peut pas juste constituer la couleur verte dont on repeint tout projet pour qu’il devienne acceptable. Sun Tzu disait dans son ouvrage “l’art de la guerre”, “Celui qui n’a pas d’objectifs ne risque pas de les atteindre”. Alors, au risque de nous répéter, les écologistes demandent que des objectifs clairs, basés sur des diagnostics approfondis soient définis , et que des indicateurs en permettent le suivi. C’est la condition sine qua non d’une politique efficace.

Julie Tokhi, conseillère métropolitaine Europe Écologie Les Verts du groupe Le temps de l’écologie