Rapport Orientations Budgétaires 2023 // Intervention de Jean Duverger à St-Etienne Métropôle // 2 février 2023
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La  commission des finances de Saint-Étienne Métropole s’est tenue le 9 janvier dernier. Cette circonstance nous a permis de découvrir le rapport, pour une fois, en amont, de la réunion  du bureau du 25, et  de notre séance de ce jour.  Pour nous, qui ne participons pas aux délibérations du bureau, c’est l’opportunité de contribuer de manière plus efficace au débat. Sa présentation a donné matière à des discussions intéressantes entre tous les participants. Comme quoi, un brin de contradiction ne peut pas nuire à la qualité des arguments échangés…

Il faut dire que la période est délicate et que l’on voit poindre des révisions que l’on peut qualifier de déchirantes ou de nécessaires, voire d’indispensables. Cela dépend de quel point de vue on se place. Pour nous, Écologistes, vous l’aurez compris, elles sont nécessaires et indispensables. 

Le Vice-Président Julien a insisté dans sa présentation sur la situation exceptionnelle qui nous est donnée de vivre. Certes, mais les circonstances actuelles, que sont les suites de la crise sanitaire de la Covid-19, la guerre en Ukraine, l’inflation forte induite, et la hausse exponentielle de l’énergie qui en résulte, ne sont que les révélateurs des limites d’un système économique et social à bout de souffle. 

Les écologistes alertent depuis longtemps sur le parti pris d’un néolibéralisme qui ne vise qu’à  maintenir la croissance économique à tout prix,  les yeux fixés sur la hausse du PIB. PIB, « qui mesure à peu près tout, sauf ce qui rend une vie digne d’être vécue ». Ce faisant, on insulte l’avenir.  Il est de plus en plus évident qu’une croissance infinie dans un monde fini, ce n’est pas tenable,  à moyen et peut être même à court et très court terme.

Il y a urgence à changer de logique,  6 des 9 limites qui assurent la viabilité de notre monde sont d’ores et déjà dépassées. (Cf :  « Théorie du Donut » Kate Raworth.)

Si les circonstances  auxquelles nous sommes confrontées sont mises en avant, elles n’ont pourtant vraiment rien de surprenant. Le rapport Meadows du M.I.T. “ Halte à la croissance “ date de 1972 ! Et on continue à soutenir l’insoutenable. 

Le plan de relance voulu par cette assemblée, en septembre 2021, dans un tout autre contexte, prévoit 1,2 milliard d’investissements jusqu’en 2026, sans que soit prévu de conditions particulières pour le choix des investissements aidés. 

Les critères de respect de l’environnement, d’utilité sociale des équipements, d’économie d’énergie, ou la priorité donnée à la production d’énergies renouvelables sont absents. 

Va t-on continuer à investir dans la construction d’une patinoire, dont les coûts de fonctionnement sont élevés, ou plutôt dans la maîtrise de l’approvisionnement en eau de la métropole ?

Le vital, ou le futile, l’efficace ou le superflu. 

On le voit, il y a des options à prendre pour ne pas insulter l’avenir. Les vieux schémas basés sur l’attractivité économique et les grands équipements sportifs ont du plomb dans l’aile, alors de grâce pas d’acharnement thérapeutique à leur égard ! 

Dans ce rapport, comme d’habitude, c’est le troisième de la mandature, il manque souvent les données sur les années passées pour apprécier l’efficacité ou non des politiques menées. Une série sur trois années consécutives serait bienvenue. 

On rappellera, encore une fois, notre demande de disposer d’indicateurs, définis en fonction des objectifs assignés à nos politiques. Qualitatifs et quantitatifs, ils permettraient d’évaluer leur efficacité, de corriger le cas échéant leur mise en œuvre et de les réformer. 

La mutualisation des services financiers devrait vous y aider. La mairie de Saint-Étienne a lancé, sur notre suggestion, la mise en place d’un « budget vert ». Cette démarche contribue grandement à casser la logique des silos entre directions, et donne une  cohérence aux différentes politiques menées en évaluant systématiquement leur incidence en termes de production de CO2.  

Plusieurs collectivités vont plus loin et se lancent dans la mise en place d’une comptabilité rénovée, qui prend en compte l’impact des politiques publiques au plan social et environnemental. Cette approche,  très éclairante, fait-elle partie de vos projets ? 

Ceci dit, on découvre au fil du rapport des opportunités à saisir et les pièges à éviter. 

Les opportunités à saisir c’est de savoir comment mobiliser au maximum le fonds d’accélération écologique dit ” fonds vert ” de 1, 5 milliard d’euros. Peut-être en privilégiant de manière claire les investissements qui concourent à conforter la résilience de la Métropole, ce qui activerait un effet levier intéressant. Vous qui dites être à la recherche de nouvelles ressources, celles-ci ne sont pas à négliger, et incroyable nous y sommes pour le coup très favorables. 

Le Plan pluriannuel d’investissement doit être révisé au regard de cette incitation de l’État. Comme  la grande majorité des communes de la Métropole s’efforcent d’avoir des projets exemplaires en la matière, il serait dommage de ne pas en faire une obligation.  Il est sans doute opportun de savoir réécrire le règlement qui préside à son attribution. Les circonstances ont évolué,  notre suggestion passée devient  aujourd’hui nécessaire. 

Si vous restez bloqué par votre promesse de ne pas alourdir la fiscalité, après le pacte financier voté en septembre 2021, on devra recourir à l’emprunt, alors que les taux s’établissent à un niveau élevé. La diminution de  l’épargne nette prévue passe de 25,1 M d’euros à 15,1M. Réduisant d’autant nos marges de manœuvre. Des arbitrages seront nécessaires voire indispensables lors du vote du Budget. Ils seront cruciaux pour l’avenir de notre collectivité.

Dans cette perspective, alors que le taux d’inflation progresse, les coûts de fonctionnement de l’Arena, évoqués, mais non quantifiés, il est parfois de saintes pudeurs, rappellent le poids sur les finances que génèrent de grandes structures. Dans la même veine, est-il essentiel de s’entêter à construire une nouvelle patinoire, ou de continuer à promouvoir le projet Cité 2025, alors que l’on a renfloué pour déjà 1 400 000 euros la Cité du Design. 

Tout investissement doit être évalué sur la durée globale de son utilisation à venir.   Il est urgent d’avoir cette exigence toujours présente à l’esprit au moment de décider.

Mais surtout il y a mieux à faire pour diminuer les frais de fonctionnement liés à l’inflation et surtout à la hausse des coûts de l’énergie. Comme nous l’évoquions dans notre intervention sur le rapport Développement Durable, il faut prioriser  tout ce qui concourt à conforter la résilience de notre collectivité. Aller à l’essentiel, garantir son approvisionnement en eau, une priorité absolue, venir en aide aux plus démunis frapper de plein fouet par l’inflation, isoler les bâtiments et les logements pour améliorer le reste à vivre,  mettre en place à l’échelle de la métropole un plan de déplacement prioritairement tourné vers l’amélioration de la desserte des petites communes … 

Devant l’émergence, hélas très brutale, mais prévisible, d’un contexte nouveau, il faut  réviser, urgemment, notre manière de compter, de décider, et de se projeter dans l’avenir. Faute de quoi, notre collectivité aura failli dans la sauvegarde de la qualité de vie de ses habitantes et habitants. 

Jean Duverger, Conseiller Génération Écologie de St-Etienne Métropole