Rester fière de ses valeurs … // Anne de Beaumont // 1er Mars 2019
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Les temps ont changé ! Finie l’époque où il ne fallait pas critiquer le Goulag sous prétexte que ça fragiliserait les combats politiques de la gauche !

La parole est libérée sur de nombreux sujets, encore il y a peu mis sous le tapis, parce qu’il ne fallait pas en parler, ça fragiliserait le parti, la majorité, le pays, l’Eglise …. Un immense mouvement de levée des tabous et des silences, traverse les sociétés du monde depuis notamment les victimes des pédophiles, la sortie du silence des victimes de dictatures, et la grande vague de libération de la parole des femmes avec Me-too à propos des violences et des atteintes sexuelles faites aux femmes.

Qui a noté dans vos chroniques de presse que sur les 10 signataires de notre équipe de Firminy, demandant au Maire de se retirer, nous sommes 9 femmes de plusieurs partis, et une élue non encartée ?

Moi, qui suis une femme féministe depuis mon adolescence, bien avant mes combats écologistes, devrais- je renier ces valeurs, ces convictions personnelles profondes qui construisent ma vie de tous temps, pour préserver une unité de façade d’une équipe municipale, autour d’un Maire, condamné par la Justice en premier jugement, à un mois de prison avec sursis ? Et cette condamnation n’est pas pour une infraction routière ! Nous les femmes, avons droit à plus de considération !

En tant qu’élue écologiste, je sais la valeur et l’importance de l’exemplarité pour être crédible dans mon combat. Si je ne fais pas ce que je dis, je perds toute cohérence dans mes propositions de changer de comportements pour respecter la finitude de notre planète !

Il en est de même aujourd’hui, pour TOUS les élus, qui se doivent, plus encore qu’auparavant, être exemplaires : Des élus ont été épinglés à juste titre pour fraude fiscale, détournement de biens sociaux, utilisation de fonds publics à des fins électorales, … Il est sain et juste que les faits d’agression sexuelle et de discrimination soient enfin sanctionnés par la justice. Fini le droit de cuissage, pourtant encore existant en 1968, au nom du libertinage ! Et moi, je suis fière que dans mon parti, des femmes aient eu le courage d’être lanceuses d’alerte : je leur dois de continuer ce combat si inégal : Les langues se délient et chacune de nous, femmes, avons vécu dans notre existence politique, des faits inadmissibles de harcèlement sexuel, d’atteinte à notre dignité de femmes… Hélas, pour certains faits, il y a prescription ! Mais il y aurait beaucoup à dire …

Certains laissent à penser que nous, les « 10 insoumis de Firminy », ferions le jeu de l’opposition en manifestant notre désaccord avec le Maire, en lui demandant de se retirer au vu de cette affaire judiciaire qui porte ombrage certes sur lui, mais aussi sur l’ensemble de la commune et de la gestion communale ! Nous avons été longtemps loyaux, (pendant ces deux ans et demi de doute et de suspicion). Mais aujourd’hui, nous avons le devoir de « sauver notre honneur d’élus de la République ». A ce titre, nous ne souhaitons pas que notre travail acharné d’élus soit ombragé par cette affaire judiciaire.

Cette affaire prend toute la place aujourd’hui dans la ville, mais pas de notre fait ! Simplement parce que la Justice s’est prononcée et que les citoyens sont en droit de s’interroger : Pourquoi la société serait-elle plus conciliante après le jugement d’un maire, qu’après le jugement de tout autre citoyen ? Comment maintenir son autorité de premier magistrat quand la Justice a prononcé une peine ?

Certes aujourd’hui, le Maire fait appel ! Cela suspend l’effet du premier jugement, mais n’efface pas la suspicion et le doute dans la tête des citoyens, et notamment des Appelous ! Que le Maire se maintienne pendant cet appel, c’est la double peine pour la commune : pendant des mois, la ville va vivre dans cette ambiance délétère d’attente et de doute. La Ville de Firminy mérite mieux que cela !

Il ne s’agit pas de s’acharner sur un homme, dont nous n’avons pas à nous prononcer sur sa culpabilité ou non, ceci est le travail de la Justice. Mais maintenant il s’agit de défendre l’intérêt général face à l’intérêt particulier.

Notre bilan municipal est plus qu’honorable à un an de nouvelles élections et nous n’acceptons pas que ce bilan et que la réussite de nos actions, soient perturbés sans cesse par cette ambiance d’attente et de doute. Le projet majeur de la transformation de la place du Breuil porte des enjeux forts qui nécessite une mobilisation de tous pour que la Ville soit adaptée à la fois à tous ses usagers (séniors, PMR, enfants, cyclistes, …) et que notre ville ait des politiques publiques d’adaptation au changement climatique. Mais tous ces débats sont hélas oubliés derrière cette « affaire judiciaire de Firminy » .

Et aujourd’hui, si j’ai signé pour demander ce Conseil Municipal Extraordinaire, c’est au nom de ces valeurs républicaines et humanistes, où je souhaite que le débat soit mis sur la place publique. Les citoyens méritent cette clarté, cette transparence, cette exigence de débat devant tous. Pourquoi ce débat sur la meilleure façon de gérer la Ville devrait- il se cantonner à un simple débat en conclave fermé, entre élus de la majorité ?

Le dégoût croissant des citoyens pour les « combines et pratiques limites » de certains élus, ne doit pas aboutir à des réactions de populisme et de défiance face aux valeurs fondamentales de la démocratie.

Aujourd’hui, mon combat est porté par deux priorités majeures :

  • Lutter au maximum contre les facteurs qui contribuent aux dérèglements climatiques (avec notamment la participation à la proche marche climat du 16 mars, le lendemain de la grève climat des lycéens)
  • Et résister de toutes mes forces contre la montée des valeurs xénophobes et nationalistes mortifères pour notre démocratie et pour la défense d’un monde ouvert et du respect indéfectible de l’Autre. 

C’est au nom de ce combat essentiel et par respect pour certaines aspirations portées dans le fond du mouvement des Gilets Jaunes, que je souhaite que nous ne cachions pas sous le tapis, nos divergences et nos exigences éthiques et que puisse être posé sur la place publique, ce débat sur la suite de notre action politique municipale. Loyale mais pas complice. Et fière de ces deux combats si essentiels. 

Anne de Beaumont, conseillère municipale et métropolitaine Europe Ecologie Les Verts de Firminy